Dans mon parcours comme intervenant au Traversier, j’ai eu la chance d’accompagner d’innombrables personnes dans leur rétablissement en santé mentale.
Pour moi, chacune de ces personnes est, à sa manière, un véritable guerrier. Bien entendu, je ne parle pas d’un guerrier qui se bat contre un envahisseur extérieur ou pour défendre sa patrie. L’ennemi que ces guerriers affrontent quotidiennement est davantage insidieux et sournois. Celui-ci vit en eux et fait aussi partie d’eux d’une certaine manière. L’ennemi dont je vous parle, vous l’aurez deviné, n’est nul autre que la maladie mentale et les symptômes qui y sont associés.
Les personnes vivant avec une problématique de santé mentale et qui se rétablissent doivent apprendre à apprivoiser cet ennemi, à le connaître et à le comprendre afin de diminuer et, éventuellement, d’éliminer son emprise sur eux et retrouver une vie satisfaisante. Pour ce faire, à travers leur cheminement, tous ces guerriers développent et appliquent les vertus du Bushido, que ce soit de manière consciente ou non.
Le « Bushido » est un mot japonais qui signifie « La voie du guerrier ». Le code du Bushido a été établi comme code d’honneur des samouraïs. Bien plus qu’une liste de commandements ou de principes à respecter, c’est un guide à suivre, un processus à appliquer tout au long d’une vie. Un peu comme l’approche du rétablissement que l’on enseigne davantage comme un processus qu’une finalité.
Bien que réservé à l’origine aux guerriers japonais, le Code du Bushido est, de nos jours, applicable à chacun.e d’entre nous au quotidien, en fonction des défis et des objectifs que l’on se donne. Il comporte sept vertus pouvant nous inspirer dans notre quotidien afin de nous aider à tendre vers un bien-être plus durable et surtout plus riche de sens.
LA PREMIÈRE VERTU « GI » représente l’intégrité, la rigueur ou la droiture. Elle est la vertu fondamentale sur laquelle s’appuient les suivantes et fait référence à notre manière de penser, de prendre des décisions justes, d’agir de manière rationnelle et de nous garder sur le droit chemin.
LA DEUXIÈME VERTU « YŪ » signifie le courage qui permet d’oser affronter les difficultés de la vie. Cette vertu encourage la prise de risque afin de se dépasser, tout en évaluant le danger. Elle nous invite à sortir de notre zone de confort pour surmonter les obstacles et relever les défis qui nous font grandir. Dans son application moderne, le courage engage à l’action et permet de se rapprocher de notre objectif un pas à la fois. Par la succession de multiples réussites, elle permet d’augmenter l’estime de soi, donc le niveau de qualité de vie des individus.
LA TROISIÈME VERTU « JIN » représente la compassion et la bienveillance. Elle fait référence aux valeurs de l’amour, de la sympathie, de l’entraide et de l’altruisme. Elle est reconnue comme étant l’attribut le plus élevé de l’âme humaine. Cela peut vouloir dire d’actualiser le plein potentiel de nos forces, de nos qualités, de nos talents et surtout, les mettre au service de l’autre. Ici au Traversier, c’est une des vertus que l’on préconise le plus et que l’on voit en action régulièrement lors du partage de vécu et de l’entraide quotidienne entre les membres.
QUATRIÈME VERTU « REI » est souvent traduite par politesse, mais fait aussi référence à la notion de respect. Selon cette vertu, le vrai guerrier respecte l’autre et il se doit d’être courtois, même avec ses ennemis. Il n’est pas seulement respecté pour sa force, mais surtout pour ses interactions sociales respectueuses et considérées. En l’appliquant à notre réalité actuelle, on développe nos habiletés sociales, on encourage le respect en démontrant du respect et on développe l’acceptation de l’autre et de sa réalité dans le non-jugement, valeurs que l’on retrouve aussi beaucoup ici à l’organisme.
LA CINQUIÈME VERTU « MAKOTO » fait référence à l’honnêteté ou à la sincérité. Lorsque le guerrier s’engage à accomplir une tâche, on peut la considérer comme déjà accomplie et rien ne l’empêchera de mener à terme ce qu’il s’engage à faire. Dans une optique de rétablissement en santé mentale, on peut comprendre assez rapidement sa pertinence. En étant honnête et sincère envers soi-même et envers les gens qui m’accompagnent, je me permets de prendre conscience de mes difficultés en toute humilité, de cibler mes axes d’améliorations et ainsi de continuer à me développer et grandir. C’est en reconnaissant et en admettant ses erreurs que l’on apprend à ne pas les répéter.
LA SIXIÈME VERTU « MEIYŌ » symbolise l’honneur et est sans doute la valeur la plus importante de ce code. Au même titre qu’il est responsable de ses paroles, le guerrier prend la responsabilité de ses actions. Les décisions qu’il prend ainsi que la manière dont celles-ci seront menées à terme sont un reflet de qui il est vraiment. De nos jours, l’honneur n’est peut-être plus monnaie courante dans le jargon populaire, cependant on parle davantage de responsabilisation. Chaque individu est responsable de ses actions, de son rétablissement et, par le fait même, de son bonheur. Rejeter le blâme sur autrui ou se justifier constamment par des causes externes à soi sont des obstacles à l’actualisation de son plein potentiel et à la création d’une vie heureuse.
LA SEPTIÈME VERTU « CHŪGI » représente la loyauté. Le guerrier mettra les besoins et les intérêts du groupe au-dessus de ses besoins et intérêts personnels. Les besoins du groupe ainsi que ceux des membres qui le composent sont indissociables. L’individu qui respecte Chūgi demeure donc immensément loyal envers les personnes de son groupe d’appartenance et tous ceux.elles envers qui il a un engagement.
Dans notre quotidien au Traversier, nous pratiquons cette vertu tous les jours puisque nous interagissons davantage en groupe qu’en individuel. Dans son application plus moderne, Chūgi invite à considérer les besoins d’autrui comme équivalents et aussi légitimes que les nôtres, ce qui permet aux individus de faire preuve de plus d’empathie et de respect dans leurs interactions les uns avec les autres.
En conclusion, bien que le Bushido ait été créé à l’origine pour guider les pratiques des guerriers du Japon ancestral, on comprend dans cet article que ses principes sont applicables et très pertinents dans notre société moderne occidentale.
Ce code moral est donc à la portée de tous ceux.elles qui aspirent à développer une meilleure version d’eux.elles-mêmes par l’intégration de cette pratique spirituelle étroitement liée et complémentaire, à mon avis, à l’approche du rétablissement en santé mentale que nous priorisons au Traversier.
Médiagraphie
L’âme du Japon, de Inazô Nitobe : https://fr.wikipedia.org/wiki/Bushido#Le_bushido_ aujourd’hui
The essence of Bushido, de Yasoroku Soejim : https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4342315/
https://www.psychologue.net/articles/bushido-codedhonneur- aux-7-vertus-pour-une-meilleure-version-de-soi
https://thecomicvault.files.wordpress.com/2019/02/ bushido-virtues.jpg?w=1024 LA